Et voilà c’est dit et c’est fait. Cette édition 2021 est la plus belle que j’ai eu la chance de courir. Elle me permet d’obtenir mon dixième maillot de finisher. Et quel plaisir de participer à cette « doyenne des courses natures » !
Les chiffres, rien que les chiffres pour commencer
Pour ceux qui n’ont pas envie de lire le récit voici les chiffres.
Je termine cette SaintéLyon qui cette année aura pour calibration 78 kms de sentiers et de route ainsi qu’un peu plus de 2000 D+ en 8 heures et 50 minutes à la 280 ième place sur 4073 finishers et 4656 concurrents au départ soit dans les 7% des finishers (et 5% dans ma catégorie M1/M2H). Soit à une allure de 6 minutes 48 secondes au km. Le score ITRA est de 592.
Il s’agit de mon 10ièm maillot de finisher de la STL non consécutif…
Voilà, place au récit.
Le psychotage
C’est devenu un rituel désormais pour moi. J’ai besoin que chaque année les choses s’organisent toujours de la même manière jusqu’à un point tel que même les repas des dernières 24 heures doivent être calibrées toujours de la même manière, année après année. Oui, je sais c’est grave, et je ne me soigne pas.
Mais la vraie inquiétude à laquelle je fais face est de savoir comment me vêtir étant donné les prévisions météorologiques. J’ai toujours en tête cet abandon pour hypothermie en 2019 et je sais que la pluie battante requiert un matériel spécifique pour prévenir ce risque. Donc c’est avec la même obsession d’un adolescent qui checke son compte instagram toutes les 10 minutes en mal de reconnaissance, de likes et de décharges de dopamine que je checke quant à moi mon application préférée à savoir « MétéoFrance » pour actualiser toutes les heures l’icone de la météo sur les communes de St Etienne / St Christo / St Catherine et Soucieu en Jarrest. Or, l’affichage des icones « neige et pluie » en même temps me laissent perplexes. C’est de la neige ou de la pluie ? Pourriez vous trancher SVP Monsieur Météo ? Et si c’est de la pluie, est-ce de la pluie fine ou pluie battante ? Car de cette réponse découle le choix de prendre, ou pas, une membrane Gore Tex de 400 grammes (et autant en euros) que je mettrais dans mon sac à dos de 400 g également. Soit un delta de poids à porter de près de +1 kg ! Or, depuis plusieurs éditions je cours très léger sur la SaintéLyon étant donné l’impact important du poids à transporter sur la performance.
Finalement le jour J je vais me résoudre à ne prendre aucun risque de me retrouver détrempé. Il semble, selon mes appli d’IA et d’analyse de datas à réseaux de neurones qu’à Soucieu la pluie succédera à la neige au petit matin au moment de mon pointage. Donc, si cette pluie est forte je sortirai de mon sac à dos de 11 litres Salomon ma « Gore Tex Arc’Téryx de la mort qui tue et me rend invincible » (testée et approuvée sur le Tor des Géants).
En revanche pour le reste de la course je m’habille de la manière suivante : Un haut à manche longue technique (hyper classique) que je recouvre d’une membrane Gore Tex à la Mickey. C’est quoi un « Gore Tex à la mickey » ? Et bien se dit de ces troisièmes couches de moins 100 grammes vendues fort chères (plus de 100 euros) dont on vante les mérites en toutes circonstances atmosphériques. Mon conseil ? Ne pas croire tous les chants des sirènes du marketing. Quant au bas qui recouvre mes jambes, il s’agit d’un textile imperméable ample acheté à peine quelques euros chez Decathlon et qui s’avère être le meilleur achat que j’ai jamais réalisé. C’est testé et approuvé par votre serviteur sur l’UTMB et le Tor des Géants. La frontale ? C’est une bombe, puisqu’il s’agit d’une Kiska de la marque Stoots qui remplace une marque de frontale bien connue qui m’a toujours causé énormément de dommages en raison de son manque de fiabilité chronique (batteries défectueuses, batteries que l’on pense chargées et qui ne le sont pas, difficulté à changer les batteries avec des doigts gelés sur le col Entrelor…).
Les 24 heures qui précèdent
Je passe assez vite sur le TGV Paris/Lyon qui a 3h30 de retard le vendredi soir alors que j’avais prévu de dormir dès 22 heures. Finalement c’est dodo à partir de 1h du matin mais je me réveille à 8h45 juste le temps d’aller rue de Navarre (au km 2 après les escaliers) en face de la copro de ma belle mère pour encourager, avec mon bonnet à pompon flaggé STL, les coureurs de la LyonSaintéLyon (et notamment mon pote Sylvain) en leur souhaitant de les revoir au même endroit le lendemain dans le sens du retour.
Après un passage au Kitchen Café pour une assiette salée, retrait des dossard à 10h30 à la Halle Tony Garnier, un coucou à Etienne l’organisateur de l’excellente Trans Aubrac, l’achat d’une lampe de secours chez Stoots, d’un gobelet plastique rétractable et me voilà de nouveau chez ma belle-mère à la Mulatière pour engloutir des quenelles lyonnaises à la sauce béchamel. Certes la sauce en question, dans l’absolue (je ne parle pas spécifiquement de celle de ma belle-mère excellente cuisinière), ne contribue pas à la notoriété de la gastronomie française dans le monde par sa légèreté : il s’agit de lait bouilli lesté par un empois d’amidon. En revanche elle remplit parfaitement son rôle de vous tomber sur l’estomac (parfois jusqu’aux talons) pour vous permettre à la fois de vous fournir l’énergie dont vous allez avoir besoin pour fournir un effort intense mais également pour vous assommer suffisamment pour aller faire une sieste au plus vite. C’est ce que je fais sur les coups de 14 heures pour environ une bonne heure !
Ensuite direction Villars par le train Oullins/St Etienne Châteaucreux où je suis accueilli comme un roi par Yves et Lulu pour une soirée 3 étoiles près du feu de cheminée comme le veut la tradition. Quel bonheur et réconfort. Après la traditionnelle pasta, le petit dodo direction les sas de départ à 10 minutes de voiture.
Top départ peu avant minuit
Et c’est parti sous les flocons de neige. J’attaque cette portion pas très jolie jusqu’à Sorbiers. Je préférais le parcours d’origine du début des années 2010. Je m’en sors assez bien, les sensations sont bonnes. La température est idéale, je n’ai pas froid (limite chaud), et ne transpire pas évitant ainsi d’avoir le textile détrempé. Autant le dire j’ai vraiment le « guane » (private citation). Et c’est l’arrivée au ravito de Saint Christo qui se fait quand même attendre.
Bilan de la portion Saint Etienne / St Christo au km 18
- Temps de course de la portion : 1h49
- Cumul depuis le départ : 1h49
- Classement : 633
Mon rituel à chaque ravito est toujours le même : deux à trois verres de Coca Cola, une madeleine, une barre de céréales pour les oiseaux (je crois que cela va me donner des ailes). Et je ne reste pas plus de 3 à 4 minutes.
Nous attaquons la plus belle portion de cette SaintéLyon selon moi. La montée vers Sainte-Catherine. Les rebords des chemins sont complètement enneigés, les reflets des frontales contribuent à donner une atmosphère unique que l’on ne peut connaître que…sur une SaintéLyon. Non je suis désolé de dire que les appareils photos n’ont pas le sensibilité de nos pupilles. Sur ce fameux chemin de crête, certes balayé un peu par le vent je vais connaître le plus beau moment de cette longue nuit. J’ai l’impression de voler, d’être léger, comme si cette neige qui me vaporise m’aidait à être en suspension dans les nuages. Le plaisir est MA-XI-MAL. Et toujours ce regroupement de personnes depuis l’année 2010 postées près d’un feu à côté d’une camionnette avec des enceintes qui diffusent, à ce moment je ne sais plus quel titre (en 2018 c’était Guns n Roses), mais je les adore car ils contribuent à mon bonheur. Rendez vous l’année prochaine ! Et c’est la descente, toujours aussi périlleuse sur Sainte-Catherine.
Bilan de la portion St Christo / Sainte Catherine au km 32
- Temps de course de la portion : 1h47
- Cumul depuis le départ : 3h36
- Classement : 510 (gain de 123 places)
Ensuite je vais quand même être moins euphorique. J’accuse un peu le coup. C’est mon gros coup de mou. Je me sens un peu lourd. J’ai du mal à relancer. Le paysage est toujours aussi fabuleux, et il me permet de trouver l’énergie de continuer. Les descentes sont techniques et périlleuses. Juste après le Signal Saint André dans les 20 premiers mètres de la descente je manque de glisser et de me faire très mal après une de ces rigoles qui traverse les sentiers. A noter que ces paysages de sentiers de sous bois curieusement enneigés éclairés par nos frontales lors de la montée du Signal sont juste féeriques, un décors de cinéma digne du film du Seigneur des Anneaux (et seule la participation à la SaintéLyon peut offrir ces images…je me répète).
En revanche la toute première descente après le Signal est extrêmement dangereuse car très technique. On manque de chuter sur d’énormes cailloux qui affleurent le tapis de neige et de glace.
Lors du croisement de la route goudronnée qui amorce la remontée vers le chemin qui serpente pour nous mener au ravito de St Genou je fais une chute arrière en raison de la couche de verglas qui est sur le bitume. J’atterris assez mal sur mon pouce de la main gauche qui se retourne et qui me fait un mal de chien pendant de longues minutes. Mais finalement rien de bien méchant et nous voilà très bientôt au ravito où j’avais abandonné pour hypothermie en 2019.
Bilan de la portion Sainte Catherine / St Genou au km 45
- Temps de course de la portion : 1h39
- Cumul depuis le départ : 5h15
- Classement : 414 (gain de 101 places)
Il est près de 5 heures du matin et je reprends des couleurs après avoir connu une montée jusqu’au Signal assez laborieuse. Je sais qu’il y a une majorité de descente à partir de maintenant. Je cours pratiquement seul désormais. Cela signifie que l’on a tout intérêt à avoir une frontale qui soit fiable et qui ne se mette pas à clignoter comme cela a pu m’arriver lors d’une précédente édition avec cette marque que je renie. Nous sommes seuls dans les descentes dans les sous bois.
J’attends l’heure de vérité. C’est quoi cette « heure de vérité ». C’est ce ravito de Soucieu où l’on a l’habitude de dire que la SaintéLyon commence réellement là. En fait il faut comprendre qu’il s’agit du point à partir duquel tout se joue : soit on a encore de l’énergie pour courir sur la partie la plus roulante après 6 heures d’effort soit on entreprend alors de poursuivre au rythme de la « marche des macchabées » sur plus de 20 bornes…et la route est alors longue, très longue jusqu’à Lyon…
Alors vient pour moi l’heure de vérité sous une pluie fine sur les coups de 6 heures du matin.
Bilan de la portion St Genou / Soucieu en Jarrest au km 55 et 1740 mètres de D+
- Temps de course de la portion : 1h39
- Cumul depuis le départ : 6h30
- Classement : 374 (gain de 40 places)
Au ravito j’ai envie de salé. Du pain, du pain !!! Enfin. Je ne reste pas longtemps après mes 3 verres de Coca-Cola, du pain et c’est reparti illico de ce gymnase. Et je suis heureux de constater que j’ai encore des jambes pour courir après la traversée de ce lotissement. Il va falloir que je me mette dans ma bulle d’autant que la pluie est un peu plus forte. Néanmoins la « Gore Tex de mickey » qui a l’esthétisme d’un sac poubelle me suffit, ma Gore Tex Arc’téryx à 400 grammes quant à elle restera dans mon sac jusqu’à l’arrivée. Elle était inutile mais psychologiquement elle m’a procuré du réconfort.
Et c’est parti pour 2h20 de souffrance douce jusqu’à Lyon. J’ai la tête dans le guidon pour cette portion de plats/faux plats et de délivrance après la montée des aqueducs de Beaunant. Chaponost arrive assez vite, c’est la portion durant laquelle la pluie sera la plus forte. Je trouve très étrange ces 200 mètres avant le ravito où l’on voit cette double file sur la route avec les coureurs revenant dans l’autre sens (car sortant du ravito on revient sur nos pas sur la route goudronnée pour contourner un sentier détrempé et non praticable).
Bilan de la portion Soucieu en Jarrest / Chaponost au km 65 et 1857 mètres de D+
- Temps de course de la portion : 1h00
- Cumul depuis le départ : 7h30
- Classement : 333 (gain de 41 places)
Il reste un tout petit peu plus de 12 kms. J’aime beaucoup cette portion où il faut soutenir l’effort jusqu’à la montée de Beaunant. Ensuite c’est comme si c’était gagné, et puis il y a cette traversée de St Foy-lès-Lyon que j’adore (je m’y suis marié !), le jour se lève doucement. Au moment où je plonge sur la route de St Foy, j’entends le coq chanter. Je bourrine et puis je manque de me faire renverser par une voiture qui fonce sur la route de St Foy (juste avant la montée sèche de la côte des aqueducs). Incroyable, personne de l’organisation pour réguler la circulation au croisement de cette route carrossable ! Je vois deux bénévoles qui ont l’air de jouer à la coinche de l’autre côté de la route juste le long de la barrière, j’ai envie de leur hurler dessus mais n’en ai pas la force car j’ai besoin de mes dernières ressources pour attaquer la montée à plus de 30%.
Les circonvolutions dans le parc accrobranche sont probablement très drôles quand on n’a pas 70 kms dans les pattes. On remonte sur La Mulatière, la fameuse rue de Navarre que je connais si bien (mes enfants également) et puis cette descente d’escaliers que je saute littéralement, l’adrénaline est déjà à un niveau élevé, l’épingle à cheveux sur le quai de Saône plutôt lugubre et coupe gorge jusqu’à l’escalier montant. Le magnifique Pont Raymond Barre surgit, fendant une ambiance de grisaille et de crachin qui me pousse à me sentir euphorique. Je trouve magnifique même le pont de la Mulatière et le musée des Confluences (c’est tout dire). Encore des circonvolutions dans le Parc de Gerland cette fois, j’accélère pour consommer mes dernières ressources.
Et je vole pour mon dixième maillot de finisher. C’est fini et c’est écrit, il s’agit de ma plus belle SaintéLyon et je suis conscient qu’elle sera difficile à dépasser en beauté.
Epilogue
11 ans séparent ces deux images entre mon premier maillot de finisher et le dernier
Qu’est-ce qui a changé en 11 ans ? A vous de trouver.


Oui vous avez trouvé si vous répondez : « les murs du salon de ma belle-mère ! ».
Qu’avez-vous avez gagné ?
Une invitation à venir déjeuner et déguster son plat de quenelles lyonnaise à la sauce béchamel.
Qu’est-ce qu’il fait plaisir à lire cet article.
bravo Greg #10 🙂
Je savais que cela te ferait plaisir !! Mais et toi ? Où étais tu ? Je t’ai cherché partout.
j’étais bien au chaud chez moi !
Le temps n’est pas à l’engagement mental et physique nécessaire pour ce genre de défi.
J’ai atteints mon apogée sur l’édition 2018 alors je reste sur cette bonne impression 🙂
J’aimerais bien être un badaud et te voir filer dans les escaliers du grapillon et courir vers l’arrivée, au rythme de ton récit ça doit être quelque chose à voir.
Bravo 10 SaintéLyon, extraordinaire, j’étais sûr que tu aurais le mors aux dents pour engloutir cette 10e SaintéLyon.
Il y a une grosse différence entre les 2 photos: la SaintéLyon a pris 9 km (plutôt 10km mais ne chipotons pas)
Merci Sylvain. Je vois que tu portes également le bonnet à pompon flaggé STL, un bon choix 🙂 C’est surtout toi qu’il faut féliciter pour l’AR, franchement j’en suis incapable. Il faut un sacré tempérament pour envisager de faire cet allé où il y a plus de D+, je suis découragé de faire un tel truc. Le format un peu rapide de nuit me convient comme un gant…
Good Job💪💪 la machine serait elle repartie 🤔 en tout cas toujours un bon moment de lecture et d évasion 🙏🙏
La différence entre les deux photos…. Le sponsor maillot… et un coureur aguerri ✌️
Au plaisir
Merci beaucoup pour le commentaire et ta fidélité. Et concernant le sponsor entre temps ils en ont changé deux fois. Bien à toi.
Récit très sympa ! Je me fixe l’objectif de t’accompagner l’année prochaine au moins sur les 100 premiers mètres.
Hello Jean Michel, C’est avec grand plaisir que je me joindrai à toi sur la ligne de départ. Content de voir que la Saintexpress t’ait donné l’envie d’en voir un peu plus.
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