SaintéLyon 2010 : quelle(s) émotion(s) !

Arrivé à Saint-Etienne à 17h30. Je suis accueilli par ma belle famille. Direction retrait des dossards, tout se fait rapidement. Puis pasta party dans la maison d’Yves et Fred. Les pieds au chaud devant l’âtre. Quel bonheur d’être affalé sur le canapé à quelques heures du départ au chaud devant la cheminée. Puis retour au Parc des Expo avec toute la belle-famille venue me supporter : Yves, Fred, Anne Cé et le petit Lulu. En sortant de la voiture je suis pétrifié par le froid malgré mon équipement. Je me fais une grosse frayeur, il faudra impérativement que je me réchauffe vite !!

Petit tour des Halles 1 et 2 avec toute la famille, c’est drôle de voir les deux petits bout de choux traverser la nuée de sportifs affalés par terre en attendant de se mouvoir vers le départ.

Le départ fut donné à minuit comme prévu. Nous étions  5700 coureurs sur la ligne de départ prêts à arpenter les monts du lyonnais et les 68 kilomètres à venir.

Température -7 degrés, je claque des dents en attendant le coup d’envoi.  Après une traversée de St Etienne permettant de nous réchauffer, arrivent très vite les sentiers enneigés… dont certaines portions sont à près de 20%. C’est bizarre, les coureurs n’hésitent pas à se mettre à marcher. Cela me surprend. Comme quoi, le trail -c’est mon premier- c’est aussi de la randonnée.  Le décor est éblouissant, de part et d’autre du sentier des terrains immaculés de neige que nos lampes frontales illuminent dès que nous levons la tête. Le serpentin de coureurs alignés en rang d’oignons le long du chemin éclairé de nos lanternes forme comme une procession. J’ai de très bonnes sensations même si les appuis dans la neige, malgré des chaines prévues à cet effet – bien indispensables il faut le dire – sont parfois très instables ; les chevilles brinqueballent et les tendons commencent à chauffer.

Km 28, arrivée dans le petit village de St Catherine : je suis comme euphorique. Je lis les SMS et messages d’encouragement de ma famille. Je passe les premiers ravitaillements ayant suffisamment d’eau et de victuailles dans mon « camelback » porté sur le dos.

Km 35, cela passe mais je commence à ressentir de la fatigue…je prends 100 mg de caféine et c’est reparti pour un tour.

Km 43, je m’aperçois que je viens de dépasser, et ceci pour la première fois que je cours, la distance marathon…j’arrive dans l’univers de ce que l’on appelle « l’ULTRA » (pour nommer les distances de course supérieures à celle du marathon ; soit 42.1 km). C’est une première donc je savoure ce moment.

Km 44 …. Les premiers pépins arrivent : une douleur au genou extérieur gauche commence à faire son apparition. Il est 5 heures du matin passé.

Mon beau frère doit m’attendre dans le froid, je viens de l’appeler pour lui dire que j’allais arriver dans une demi heure… finalement j’arriverai 1H30 après l’heure convenue….car je suis contraint de marcher !! L’euphorie cède le pas au désespoir. Je ne suis plus mon plan de marche qui est de boire toutes les demi-heures, je suis au fond du trou. Les sentiers laissent la place à une descente vers Lyon sur du bitume verglacé et mes appuis commencent à faire TRÈS mal. Je me fais dépasser par des cohortes de coureurs, ceux là mêmes que j’avais dépassés en volant littéralement sur la neige lors des premiers quarante kilomètres. 900 coureurs me dépasseront sur 10 kilomètres que je ferai en marchant.

Km 52, je vois mon beau frère : je m’arrête pour lui faire part de mes angoisses, il est 6h30 du mat. Il m’a apporté des biscuits salés japonais – très très bons, je les dévore – (je ne peux plus manger de sucre… mon estomac n’en peut plus). Cela va un peu mieux même si la perspective de terminer les 16 Kms restants en marchant me plombe le moral. Je le quitte …continuant à marcher, claudiquer. 500 mètres plus loin je me demande pourquoi je ne suis pas reparti avec lui en voiture. Mon autre beau frère me passe un coup de fil, compatit mais en filigrane m’incite à m’arrêter. Autant le dire, à ce moment là mon moral traverse le plancher.

Je continue…et puis je ne sais plus trop ce qui s’est passé après, c’est le vrai black out, je continue à errer, à suivre la cohorte très dispersée des coureurs, beaucoup marchent comme moi, d’autres nous dépassent en trottinant. Je marche quelques mètres à côté d’un coureur aussi mal en point que moi. Je suis tenté de lui parler, mais le dialogue imaginaire du « alors toi aussi tu as mal?…moi c’est le genou extérieur droit et toi c’est quoi? » me semble tellement pathétique – je m’en veux même d’y avoir songé ! –  que je continue à marcher en le dépassant sans rien dire. Tiens, le soleil s’est levé, on peut éteindre sa lampe frontale, moi qui pensais arriver à Lyon au petit jour…

Et puis c’est le miracle !

Attention : séquence émotion 😉

Je lève les yeux et aperçois le panneau de la commune de St Foy-Lès-Lyon. C’est pour moi comme une révélation tombée du ciel ! St-Foy-lès-Lyon déjà !!! Alors que la perception des distances et du temps s’était rallongée indéfiniment…. Je me retrouve comme propulsé à près de 11 kms de l’arrivée. St Foy-lès-Lyon la commune où je me suis marié, là où ma femme, ma belle famille, un couple d’amis très chers ont prévu de m’attendre pour m’encourager. Coïncidence surprenante, je reçois en même temps un SMS d’encouragement de mon père à qui j’avais transmis une heure avant un message contant mes difficultés. J’appelle Laetitia pour la prévenir que je ne vais pas tarder à arriver au point de rendez-vous…et tout d’un coup je ne ressens plus ma douleur au genou. Je m’arrête au ravitaillement pour manger des biscuits salés, le cœur vaillant. Il reste 300 mètres avant d’apercevoir mes supporters, je leur saute au cou, je leur laisse les chaines que j’ai au pied et tout d’un coup récupère mes appuis. C’est reparti, il restera 11 kilomètres que je vais faire EN COURANT car la douleur au genou, sans être totalement partie, me fait moins mal. Il est 8 heures du matin.

Je vole, je descends sur Lyon, passe sur la presqu’île, me dirige vers la confluence, quai du Rhône, pénètre dans le Parc de Gerland…et là c’est la délivrance, je pleure d’émotion sur les derniers 500 mètres, comme un gamin. J’arrive dans le Palais des Sports archi bondé pour passer la ligne d’arrivée. C’est terminé, je l’ai fait. J’ai remporté mon premier maillot de Finisher!

Je termine 1585ième en 9H11 sur 5700 inscrits (il en restera 3880 finalement à l’arrivée), soit le deuxième quartile. Pour le premier quartile on verra la saison prochaine !

Mon plus beau souvenir sportif…qui me fait dire que oui, « certaines nuits peuvent être plus belles que vos jours » (runonline ne m’en voudra pas d’avoir repris cette citation).

19 réflexions sur “SaintéLyon 2010 : quelle(s) émotion(s) !

  1. robert penavayre

    J’ai l’impression d’avoir fait la course avec toi. T es un formidabe conteur. Quant à tes beaux frères et toute ta famille, ils sont du genre un or massif. Mais bon sang, ce que tu as dû en baver. Et quand je pense que tu veux remettre ça! Chapeau.
    Concernant ton genoux, clairement cela m’a rappelé le Chemin. La moindre tendinite ou quelque chose y ressemblant: Feldene. Il y a une base fondamentale dans les soins: enlever tout d’abord LA DOULEUR. Ensuite parler des causes. Mais dans l’urgence, il n’y a pas d’autre solution.
    C’est quand même géant ce que tu as fait.

  2. fli92

    Ton récit de la STL est très impressionnant. J’ai eu bien mal au genou moi aussi sur la fin en 2009 (je fais comme si j’étais un habitué mais ça a été mon unique participation, pour le moment…), mais jamais au point de ne plus pouvoir courir (çà c’était plutôt la fatigue générale). J’ai aussi eu un pb d’essuie-glace après. Aux 2 genoux. Je l’ai résolu avec des semelles ortho. Pourvu que çà dure…

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